Depuis plus de cent ans et sur trois générations, l’Atelier Midavaine fait rayonner l’art de la laque à travers le monde. Les Ours, panthères, poissons, oiseaux et motifs d’inspirations chinoises prennent vie sous les mains expertes d’une équipe de laqueurs de talents. Des créations aux décors saisissants impulsés par une femme et héritière passionnée : Anne Midavaine. Signatures Singulières Magazine vous emmène à la découverte de cette Maison au savoir-faire inégalé.
Ci-dessus : Anne Midavaine devant son atelier rue des Acacias dans le 17ème à Paris.
Louis Midavaine, artiste visionnaire
Tout juste rentré de la Grande Guerre et déclaré invalide, Louis Midavaine, le grand-père, ouvre son premier atelier de laque à Paris, rue Pergolèse. Avec trois « gueules cassées », il décore des objets vendus au profit de la Croix-Rouge. Puis en 1930, il déménage son atelier à quelques centaines de mètres de l’Arc de Triomphe, rue des Acacias où il se trouve toujours. Depuis près d’un siècle, l’atelier a vu naître des œuvres plus spectaculaires les unes que les autres.
Pièces emblématiques de l’atelier de laque : les paravents aux ours polaires. En tout, douze exemplaires sont répertoriés. Un modèle fait d’ailleurs partie des collections du musée d’Art moderne de la Ville de Paris. Précurseur, visionnaire, artiste, Louis Midavaine, est le seul dans l’univers des laqueurs à s’intéresser à ces mammifères. Et pourtant, ce thème assure le succès de son atelier. Il reçoit des commandes pour décorer les cabines de première classe du mythique paquebot, le Normandie, puis pour celles du Pasteur ainsi que pour la résidence du dernier Empereur vietnamien Bao Daï, sur la Côte d’Azur.
Tigres, panthères, poissons, oiseaux exotiques… Après les ours, d’autres animaux enrichissent la palette du laqueur et habillent panneaux, buffets et paravents. Avec son bestiaire et son savoir-faire, il séduit la riche clientèle des années 30 éprise de luxe.
Laqueurs d’art sur trois générations
En 1944, à l’âge de 14 ans, Jacques Midavaine, le fils de Louis rejoint l’atelier pour y apprendre le métier avant de prendre la direction de la société en 1969. À cette époque, les fortunes des années 30 font place à l’émergence d’une classe moyenne. Comme son père, Jacques a su répondre aux attentes du moment. À la grande époque du meuble télé, l’atelier en fabrique un par semaine. Il s’ouvre également au marché américain. Des tables basses, des cabinets, ou encore des panneaux décoratifs sont envoyés par dizaines outre-Atlantique.
Jusque dans les années 90, l’atelier bat son plein. Mais en 1994, en pleine période de crise, Jacques Midavaine décède. Sa fille Anne, alors chirurgien-dentiste, quitte ses fonctions pour rejoindre, à son tour l’entreprise familiale. Après la disparition de son père, Anne Midavaine s’attelle à relancer l’activité et décroche des contrats avec des Maisons d’exception. Dans cet atelier qui est le cœur battant de sa famille depuis trois générations, Anne Midavaine, dirige – d’une main de maître ! – et crée. « J’ai reçu de mes parents l’esprit d’entreprendre » confie-t-elle à Signatures Singulières Magazine. Chaque jour, elle imagine et renouvelle les propositions créatives pour ne pas être copié et jamais égalé.
Atelier Anne Midavaine, un art décoratif à travers le monde
Véritable chef d’orchestre de l’atelier, Anne Midavaine échange directement avec les décorateurs pour définir l’orientation des travaux commandés. A ses débuts, Christian Gallion, lui ouvre les portes de Chanel, qui installe alors une boutique de joaillerie place Vendôme. D’autres grands décorateurs comme Alberto Pinto, Pierre-Yves Rochon et Juan Pablo Molyneux sont les nouveaux clients de l’atelier Anne Midavaine Paris et font entrer les décors en laque de la Maison dans des appartements en France et à l’étranger. Les représentations animales majestueuses séduisent. Tandis que certains motifs ont une approche contemporaine, d’autres s’inscrivent dans un style chinois ou japonais revisité. Une signature française qui fait mouche auprès des clients du Moyen-Orient, mais aussi en Asie ou en Russie.
Une collaboration fidèle avec la Maison Cartier
Des pièces uniques réalisées pour des particuliers, mais aussi pour de belles maisons comme Cartier (rencontré à la première édition du salon Révélations) avec qui l’atelier Anne Midavaine collabore depuis plusieurs années. En 2019, le célèbre joaillier commande à l’atelier d’art Anne Midavaine Paris un panneau de laque, de nacre et d’or pour sa boutique de Copenhague. Depuis, elle a notamment imaginé de majestueuses panthères pour les boutiques de la marque dans le monde entier comme à Changdu, Tokyo, Sidney, Singapour, New York ou encore Dubaï.
Un savoir-faire français exigeant
Venue de Chine et du Japon, la laque arrive en France XVIIIe siècle. Depuis, sa technique n’a cessée d’évoluer et de se perfectionner. La résine végétale a été remplacée par les laques cellulosiques – la spécificité de l’atelier Midavaine Paris –, polyuréthane et hydrosoluble. Une technique parfaitement maîtrisée, tant est si bien qu’aujourd’hui les Asiatiques font appel aux artisans d’art Occidentaux pour réaliser des décors en laque.
Laqueur d’art est un métier exigeant aux multiples facettes dans lequel il faut maîtriser le dessin à la perfection. Le laqueur doit également savoir appliquer l’enduit – et connaitre les secrets de la colle de peau de lapin avec laquelle il est fabriqué – et réaliser des décors en feuilles et en poudre d’or, d’argent, de nacre et coquille d’œuf. Dans son atelier, Anne Midavaine a choisi de s’appuyer sur des mains d’artistes hautement qualifiés formés par les écoles Boulles et Olivier de Serres pour façonner ses pièces uniques. Pour réaliser un décor en laque, il faut du talent, mais aussi beaucoup de travail. Et le travail paye ! En 2005, l’atelier Anne Midavaine est labellisé Entreprise du Patrimoine Vivant. Un travail salué par Signatures Singulières Magazine.
Signatures Singulières Magazine est allé à la rencontre d’Anne Midavaine pour une interview.
Ayant grandi dans l’atelier familial, avez-vous toujours été en amour pour la laque ou avez-vous appris à l’apprivoiser lorsque vous avez repris le flambeau ?
Anne Midavaine : je suis née dans un musée. Les femmes ne venaient pas à l’atelier. D’ailleurs, nous ne parlions quasiment pas du travail réalisé à l’atelier. Et pourtant, la laque est dans mon ADN. C’est avant tout culturel. J’ai choisi d’y revenir car, la laque, l’atelier familial font partie de mes entrailles.
Que représente la laque pour vous ?
Anne Midavaine : le luxe à la française. Mais aussi, une histoire de famille…
Qu’est-ce qui vous a poussé à reprendre la direction de l’atelier ?
Anne Midavaine : la mort de mon père. C’est le choix d’une femme de 35 ans à qui ce choix s’est imposé. C’est devenu une évidence.
Participez-vous à la création des nouveaux décors conjointement avec les décorateurs et les artisans de l’atelier ?
Anne Midavaine : je conçois le décor dans ma tête, puis les ateliers le réalise. Je suis le maillon entre les décorateurs et les réalisateurs. La création d’un décor est toujours un échange entre l’atelier et le décorateur. Car c’est la traduction de son idée à travers un matériau qu’il ne connaît pas et que nous maîtrisons.
Êtes-vous fière d’une pièce en particulier ?
Anne Midavaine : la prochaine. Chaque pièce est un challenge. Le challenge commence avant même la commande car il faut séduire le (futur) client. Il faut ensuite aller jusqu’au bout du projet et le réaliser en temps et en heure. Jusqu’à ce que le client soit satisfait. Il faut savoir faire preuve d’une certaine ténacité.
Atelier Midavaine Paris
54 rue des Acacias
75017 Paris
Tél.: +33 (0)1 43 80 68 94
www.ateliermidavaine.com